Face au cancer, pourquoi opposer les traitements médicaux conventionnels et les thérapies non conventionnelles ? Seule la fermeture d’esprit des partisans extrêmes, d’un côté ou de l’autre, empêche de les conjuguer.
Nous nous intéressons ici aux approches non médicales, car elles sont le plus souvent négligées alors qu’elles peuvent apporter un bénéfice, sans inconvénient ajouté, sur le chemin de guérison des différentes formes de cancers.
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I- GUÉRISON ET RÉMISSION DES CANCERS
Les statistiques du cancer sont précises et redoutables. Elles prédisent une durée de survie en fonction du type de cancer et de son stade. De telles prédictions sous-entendent qu’un cancer n’est jamais vraiment guéri. Il serait simplement en rémission, comme une maladie chronique qui laisserait une durée de répit. Il existe pourtant des guérisons définitives.
1. Pourquoi certains malades guérissent et d’autres pas ?
Dans une même situation de cancer, certains malades s’en sortent plutôt bien, d’autres moins bien, alors qu’ils ont suivi le même traitement. C’est d’ailleurs la même chose avec la plupart des traitements médicaux, qui sont validés dès lors qu’ils permettent d’obtenir un pourcentage d’amélioration significatif comparé à un placebo.
Les facteurs génétiques sont souvent évoqués pour expliquer cette disparité, et des recherches valident cette piste. Les facteurs annexes, notamment les démarches thérapeutiques non conventionnelles et les changements de mode de vie, ne sont jamais pris en compte, alors qu’ils sont une clef explicative de ces différences.
2. Rémission : la vision négative
Une rémission, c’est une accalmie transitoire, avec au-dessus de sa tête, une épée de Damoclès qui s’appelle rechute. Psychologiquement, il est difficile de faire davantage pour que cette récidive se produise. Le seul intérêt du sous-entendu de cette terminologie est de mettre en œuvre une surveillance et des méthodes préventives. Est-il indispensable de passer par cette menace pour adopter cette démarche de bon sens ?
Jacques Janet, gastro-entérologue bordelais qui a traité de nombreux cancéreux, insistait sur le bénéfice de parler de guérison et non de rémission. Il ne s’agit pas d’une naïveté sur le risque de voir le cancer revenir, cela s’observe régulièrement et c’est un fait établi. Pourquoi affirmer alors qu’il s’agit bien du même cancer ! Il semble tout aussi légitime de dire que la disparition des cellules cancéreuses est une guérison, et que le fait de ne pas avoir opté pour un changement significatif dans sa vie recrée les mêmes conditions, qui conduisent au développement du même type de cancer. Ce point de vue motive de manière plus constructive à changer ces conditions.
3. David Servan-Schreiber
Dans l’un de ses livres, David Servan-Schreiber raconte le diagnostic de sa tumeur et l’espérance de vie très courte (moins de 2 ans) qui lui a été annoncée, alors qu’il avait tout juste 40 ans. Il s’intéresse alors à la courbe du devenir des personnes ayant eu la même maladie. Il voit que la durée de vie varie de quelques mois à plus de 15 ans. Il se demande ce qu’ont fait de particulier celles et ceux qui ont eu la longévité maximale. Et c’est ainsi qu’il entre dans une recherche de thérapies innovantes, pas encore prise en compte par la science médicale européenne, et qui ont des effets démontrés sur la santé. Cette démarche lui a permis de vivre encore 20 ans. Il a ainsi introduit en France la complémentation oméga 3, la cohérence cardiaque, l’EMDR.
4. Kelly Turner et la rémission radicale
Kelly Turner est beaucoup moins connue. Diplômée de littérature de l’université de Harvard (USA), elle s’est ensuite orientée vers la dimension sociale de l’accompagnement du cancer. Son étonnement face à la rémission durable d’une personne ayant abandonné les traitements conventionnels, et le manque d’intérêt des oncologues à ce propos, l’a conduit à engager une recherche approfondie sur ce sujet. Elle découvre alors qu’il y a de nombreux cas documentés.
Elle introduit le terme de rémission radicale qui s’applique aux guérisons défiant les statistiques, survenues après avoir eu recours à des approches alternatives, dans les trois situations suivantes :
– sujets ayant refusé tout traitement médical,
– sujets ayant abandonné le traitement médical après échec de celui-ci,
– sujets ayant suivi le traitement médical mais renversé un pronostic très défavorable
Après avoir rencontré et longuement interviewé une centaine de sujets, et étudié environ 1 000 dossiers, elle a rédigé un livre [1] dans lequel elle indique les 9 facteurs récurrents retrouvés dans les cas analysés.
La démarche n’est pas scientifique, car elle ne compare pas des cohortes avec ou sans chaque facteur concerné. Elle est présentée comme un préalable qui pourrait inspirer des programmes de recherche. Cela est cependant peu probable, car les domaines concernés (psychologie, mode de vie) sont difficilement quantifiables et leur synergie est évidente, ce qui complique la mise en œuvre d’un protocole de validation des bénéfices, acceptable par la communauté scientifique. D’autre part, l’absence d’intérêts financiers liés au développement de ces approches complique la recherche de financement de telles études.
5. Soins conventionnels et non conventionnels : une stupide concurrence
Kelly Turner s’est intéressée aux personnes n’ayant pas ou plus recours aux traitements médicaux, car c’est la meilleure manière de montrer que les facteurs étudiés sont pertinents. Sinon, il serait difficile de distinguer les rôles respectifs des traitements médicaux et non médicaux.
Les approches complémentaires révélées par sa recherche sont cependant tout à fait compatibles avec les traitements conventionnels, c’est pourquoi les appliquer ne demande aucunement de refuser ou cesser ces traitements. Il est même évident que l’association des deux démarches en synergie est la meilleure proposition de programme pour traiter un cancer.
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II – LES 9 FACTEURS QUI FAVORISENT LE PROCESSUS DE GUÉRISON DES CANCERS
Kelly Turner a répertorié 75 facteurs ayant pu contribuer au processus de guérison des cancers, avec une fréquence variable. Les 9 retenus sont les plus fréquents, régulièrement retrouvés et souvent combinés. Ils donnent une trame à ce qui pourrait être le chemin thérapeutique idéal. Une recherche dans la littérature médicale a montré que la mise en avant de ces facteurs repose sur des données pertinentes.
1. Prendre sa vie en main
Il y a plusieurs attitudes face à un diagnostic de maladie : « je n’y peux rien et je m’en remets totalement au corps médical », « personne ne peut rien pour moi et je dois me débrouiller seul », ou « j’ai besoin de me faire aider en prenant ma part active dans le parcours thérapeutique ».
La première position, celle du « patient » qui souffre et se soumet passivement, jouit d’un a priori favorable, puisque la personne malade suit docilement le programme qui lui est proposé. Elle permet à tous les aspects mécaniques du traitement, pilotés par des techniciens de la santé, d’opérer de manière optimale. En revanche, elle mobilise difficilement les forces d’autoguérison.
La troisième peut être favorable par la forte implication qu’elle induit. Elle est limitante du fait que la conduite solitaire de sa barque dans ce contexte prive de nombreuses ressources. Elle est dangereuse en se coupant de l’encadrement des professionnels de santé qui connaissent les risques et préviennent des choix aux conséquences généralement néfastes.
La prise en main de notre santé ne demande pas de se couper de l’aide de soignants du secteur conventionnel, elle permet de nous appuyer sur leur aide sans leur donner le pouvoir sur nos choix et la manière dont nous souhaitons conduire notre vie. Elle permet aussi de donner à chaque professionnel une place à partir de laquelle il coopère dans un projet dont le sens est clairement défini. Elle permet de choisir un référent, qui a toute notre confiance pour nous aider à prendre les décisions importantes.
Dans une équipe thérapeutique, la technique de soin et la qualité relationnelle ne sont pas toujours portées par le même professionnel. La diversité de points de vue des soignants alimente une confusion qui complique le parcours. Le choix d’un référent relationnel permet d’être aidé pour accepter ou non certaines propositions, et faire nos choix dans un cadre qui nous aide tout en nous respectant.
En prenant en main la barre directrice de notre chemin thérapeutique, nous devenons un chef d’orchestre qui met de la dynamique et de la cohérence sur ce chemin. Cet engagement est aussi un facteur de mobilisation du potentiel d’autoguérison.
Ce positionnement dans lequel, en tant que malade, nous participons pleinement à notre parcours de soins, permet aussi d’entreprendre des changements bénéfiques dans notre vie, et de faire face aux résistances.
Les autres qui veulent notre bien dans l’idée qu’ils s’en font peuvent opposer des réserves à nos choix qui mettent le doute et paralysent la situation. La position souveraine, celle du chef d’orchestre, permet plus facilement d’entendre les points de vue des autres comme des informations utiles et non contraignantes, et non comme des pressions encombrantes.
2. Suivre son intuition
Il y a dans chaque être vivant un savoir-faire spontané qui le guide dans ses choix face à la difficulté. Chez les animaux, c’est un instinct qui dicte les comportements bénéfiques face aux problèmes de santé. Dans le développement humain, l’instinct s’atrophie en grande partie pour laisser place à la connaissance rationnelle et à l’information culturelle.
Toute la connaissance que nous avons ou pouvons trouver à l’extérieur sur notre maladie nous décrit ce qui s’est passé pour quelqu’un d’autre en particulier, ou ce que les statistiques calculent en moyenne au milieu de toutes les expériences. Dans les deux cas, c’est une connaissance mentale qui repose le passé, qui n’est jamais vraiment créative, et qui n’est pas ajustée à notre spécificité individuelle.
Pour un humain, l’accès à cette connaissance instinctive est généralement appelé intuition. Pour certains, elle passe par le corps qui « sait » ce qui est bon pour lui. Pour d’autres, ce sont des images qui apparaissent en rêve ou dans les synchronicités de la vie. Pour d’autres encore, ce sont des flashs qui se manifestent en pensée.
La difficulté est de distinguer une intuition véritable qui nous ouvre une porte nouvelle d’une imagination mécanique qui nous propose une voie séduisante pour rester dans le cadre de nos croyances limitantes. Un accompagnement psychologique par un professionnel ouvert à la dimension intuitive peut être précieux pour cela.
Suivre son intuition peut nous aider à trouver des pratiques ou des soins complémentaires bénéfiques pour nous. Cela peut aussi révéler une nouvelle direction de vie salutaire, capable de nous libérer d’un contexte qui a concentré les facteurs favorables au développement de la maladie.
3. Changement alimentaire
Le lien entre alimentation et cancer est de mieux en mieux connu. Les experts du WCRF/AICR publient régulièrement des rapports sur les facteurs alimentaires qui favorisent le cancer. Le dernier datant de 2018 [2] propose 10 recommandations qui confirment les principes de nutrition santé aujourd’hui reconnus par les nutritionnistes indépendants des intérêts de l’industrie agroalimentaire.
Les principes préventifs sont-ils bénéfiques une fois le cancer déclaré ? Il est évident que l’effet est favorable, sans pouvoir quantifier les conséquences qui sont probablement différentes d’une personne à l’autre, et que l’on ne peut dissocier des autres changements entrepris dans le parcours de soins. Il est encore plus clair que le maintien de ce changement contribuera à la stabilité d’une guérison.
Une personne ayant déjà adopté une nutrition conforme aux recommandations qui développerait un cancer pourra difficilement s’appuyer sur le changement alimentaire comme ressource de guérison. Il est alors possible d’explorer s’il existe une voix de changement qui, tout en restant conforme aux recommandations, répondrait davantage au terrain ou au besoin instinctif de la personne. Cela pourrait être une option vers le végétarisme, ou à l’inverse en sortir. Adopter davantage d’aliments crus, ou cuits, etc. L’idée n’est pas de changer pour changer, ou appliquer un idéal mentalisé. Une telle démarche se justifie que si elle réaligne nos choix alimentaires sur les besoins manifestés par le corps, en restant compatible avec nos valeurs.
Les personnes qui développent un cancer avec une alimentation occidentalisée éloignée des recommandations santé ont une immense ressource pour favoriser leur guérison. Elles peuvent associer le pouvoir guérisseur propre à tout changement important, aux bénéfices d’une nutrition mieux adaptée aux besoins de leur organisme.
Les personnes interrogées par Kelly Turner parlent volontiers d’un changement radical d’alimentation. Pour être pleinement bénéfique, ce changement doit à la fois intégrer les principes de nutrition santé, et être adaptés à la personne (terrain biologique, intolérances éventuelles). Un régime trop strict peut avoir des effets favorables dans un premier temps, et néfastes dans un second, quand viendra la prise de conscience qu’il n’est pas tenable dans la durée. C’est pourquoi un accompagnement psycho-nutritionnel qui projette dans le temps un programme durable est toujours préférable.
4. Prise de compléments phyto-nutritionnels
Les produits de santé naturels : compléments alimentaires, plantes, champignons… sont omniprésents dans les parcours thérapeutiques ayant conduit à une « rémission radicale ».
À l’opposé des médicaments qui luttent frontalement contre la tumeur, en dégradant au passage des tissus sains, ils soutiennent l’organisme dans son processus d’autoguérison. Ainsi, ils nous aident à dépasser activement l’obstacle de la maladie.
Le problème régulièrement rencontré est la grande diversité des propositions et la multitude contradictoire de conseils qui complique le choix. La prise d’un grand nombre de produits rassure dans le fait de ne rien oublier. Elle pèse aussi lourdement sur le budget, sans pour autant apporter des effets supérieurs, car les bénéfices ne sont pas cumulatifs. Cela traduit avant tout une incapacité à choisir ce qui essentiel.
Là aussi, un conseil avisé est précieux. Il y a pour chaque personne une association optimale qui correspond à ses besoins et respecte son budget.
Les produits choisis peuvent stimuler les facteurs d’autoguérison (détoxication, soutien immunitaire, régénération digestive, correction de déficiences…) ou soutenir l’organisme face à la toxicité des traitements médicaux ou face à la difficulté du parcours.
5. Libération des émotions refoulées
Une émotion refoulée peut être agréable ou désagréable, conscience ou inconsciente, ancienne ou récente. Dans tous les cas, elle n’a pas suivi le chemin naturel qui consiste à émerger, être ressentie, apporter une information, puis passer.
Elle ne passe pas parce qu’elle est trop difficile à affronter et ne peut être pleinement ressentie (émotion désagréable), ou parce que nous nous y accrochons de peur la perdre (émotion agréable). Dans les deux cas, elle se fige quelque part dans notre structure et influence certains processus biologiques.
Ce mécanisme a été clairement identifié par le Pr John Sarno dans diverses douleurs chroniques. Dans son hypothèse, celles-ci apparaissent par un mécanisme fonctionnel (donc commandé par le cerveau), destiné à détourner l’attention, afin de ne pas affronter une émotion effrayante. Dans son expérience, l’identification de l’émotion et la démarche d’acceptation qui lui permet de suivre son chemin naturel a un effet guérisseur spectaculaire [3].
Il est difficile d’identifier et de traiter seul nos émotions refoulées. L’accompagnement psychologique est particulièrement aidant pour cela. De nombreuses techniques peuvent favoriser le processus (écriture, TCC, hypnose, TIPI, EFT, EMDR, etc.). C’est avant tout la qualité relationnelle avec un accompagnant qui permet d’entreprendre et mener à terme cette démarche.
Les témoignages de « rémission radicale » mentionnent fréquemment la libération des émotions des refoulées, et non l’analyse psychosomatique qui donne un sens mental à l’origine de la maladie.
6. Psychologie positive
Nous avons évoqué la psychologie positive dans une infolettre précédente [4]. Elle nous montre à quel point le niveau de bonheur ressenti se cultive par des choix et des actes. Le fait de s’investir dans des comportements évalués comme favorables est comme semer des graines qui font pousser autour de nous un environnement de mieux-être.
Être spontanément plus heureux contribue à notre santé et nous donne plus d’énergie pour nous engager dans un parcours thérapeutique. Il est donc naturel que cela se retrouve régulièrement dans les chemins de guérison durable.
Il peut sembler difficile de cultiver le bonheur face à un cancer qui menace. Il est cependant important d’intégrer que cela contribue à le dépasser pour continuer à vivre.
7. Soutien social
Les humains, comme la majorité des mammifères, sont des êtres sociaux qui ont besoin d’être en communauté et d’être touchés [5]. Le fait d’être impliqué dans un réseau relationnel est l’un des cinq facteurs principaux qui influent favorablement sur les gènes, par mécanisme épigénétique [6].
À la fin des années 1970, David Spiegel [7] a réalisé une étude randomisée pour évaluer l’influence d’un groupe de soutien psychosocial sur la qualité de vie de femmes souffrant de cancer du sein métastatique. L’expérimentation a révélé un meilleur ressenti du vécu pendant le parcours, et aussi, ce qui n’était pas attendu, une prolongation de la durée de vie.
Le centre Ressources d’Aix en Provence s’est inspiré de ces travaux pour développer un Programme Personnalisé d’Accompagnement Thérapeutique (PPACT), destiné à donner des atouts supplémentaires aux personnes atteintes du cancer [8].
Dans tous les cas, exploiter cette ressource précieuse commence par informer et mobiliser l’entourage actuel de la personne, s’il peut jouer ce rôle. À défaut, ou si le réseau relationnel (familial, amical, social) est insuffisant ou défaillant, la solution sera à chercher du côté des groupes de soutien. Éviter l’isolement est toujours une priorité. Trouver également une solution pour qu’une personne isolée soit régulièrement touchée physiquement est parfois délicat. Il y a un tabou culturel dans notre société à ce sujet, qui nous a conduit à négliger un facteur majeur de santé et de bien-être. Nous devons être courageux et inventifs à ce sujet pour dépasser l’inertie qui pousse à ne pas aborder le sujet.
8. Approfondir la spiritualité
La spiritualité est une question complexe. Elle peut générer la méfiance du malade lui-même, de son entourage, ou du corps médical, du fait d’un amalgame avec les dérives religieuses.
Pour certaines personnes, l’ouverture à une dimension transpersonnelle est déjà présente avant la maladie et s’agrandit face à elle. Elles ont alors juste besoin d’être confortées dans le sens que cela leur est favorable, tant qu’il n’y a pas de déconnexion avec la réalité qui conduirait à négliger l’importance des traitements.
Pour d’autres, une aide est nécessaire pour découvrir cette dimension. Le danger est alors l’entraînement vers un type spécifique de spiritualité, profitant de la faiblesse face à la maladie pour recruter un adepte dans une communauté convaincue qu’elle détient la solution pour tous.
La méditation pleine conscience (Mindfullness) sur laquelle s‘appuient beaucoup les thérapies cognitivo-comportementales (TCC) de 3e vague, est une expérience laïque d’ouverture à une autre dimension de soi, dont les effets bénéfiques sont largement validés.
L’expérience peut être faite dans une séance d’accompagnement guidée ou dans un groupe. Il est possible ensuite de la répéter seul, à partir de guidages enregistrés [9].
9. Donner un sens à sa vie
Donner un sens à sa vie, c’est avoir de bonnes raisons de vivre qui donnent vraiment envie de ne pas mourir. Et donc de guérir…
Quand mourir devient la solution fataliste qui autorise à ne plus faire d’effort, il est difficile de s’engager activement sur un chemin de guérison.
Quelques études montrent que le déni de la mort, qui détourne l’attention de cette issue, augmente l’espérance de vie chez les cancéreux. Il n’y a pas encore à ce jour d’évaluation des effets du désir de vivre, qui est une manière a priori plus profitable de ne pas se focaliser sur la mort.
Le sens donné à sa vie est une composante de l’équation du bonheur établie par la psychologie positive [4]. Il a été étudié par la psychologie existentielle comme un facteur majeur de sentiment d’être bien dans sa vie, avec le désir de poursuivre le chemin. Une enquête a montré que les personnes interrogées préfèrent une vie difficile mais pleine de sens, à une vie plaisante mais vide de sens [10].
Pour certains malades, le sens est déjà là. Terminer un projet, accompagner ou voir grandir un descendant, profiter davantage de quelque chose qui a été longuement construit… Pour d’autres, la question ne s’est jamais vraiment posée. Ce pourrait âtre alors le bon moment. Un sens encore inconnu révélé par la maladie peut devenir le moteur du processus guérisseur. Les nombreux témoignages de personnes qui ont guéri d’un cancer et qui remercient leur maladie pour ce qu’elle a ouvert en eux, confirment le bien-fondé de cette démarche.
Un accompagnement adéquat devrait favoriser l’émergence d’un sens qui donne envie de vivre, sans culpabiliser si rien ne vient, et sans amplifier la peur de mourir si ce qui émerge prend la forme d’une nécessité à assurer.
10. Autres facteurs
Depuis la parution de son ouvrage et l’ouverture d’un site qui recueille les témoignages [1], Kelly Turner a analysé de nouveaux cas qui confirment l’importance des neuf facteurs initialement identifiés. Elle a aussi observé la récurrence de deux autres directions : les soins énergétiques et l’activité physique.
Les soins énergétiques ont une place à part entière dans toute démarche intégrative. La médecine traditionnelle chinoise, en particulier, utilise depuis longtemps des méthodes de soins face au cancer, qui s’intègrent facilement dans un programme global [11]. D’autres approches énergétiques peuvent aussi y trouver leur place. Leur bénéfice sera d’autant plus grand qu’elles agissent sur un processus guérisseur, et qu’elles prennent en compte l’ensemble des traitements en cours, afin de ne pas se mettre en opposition avec d’autres soins.
L’activité physique est un facteur majeur de santé, qui intervient notamment par un mécanisme épigénétique aujourd’hui bien connu. Les êtres humains ont toujours été dans le mouvement, et le programme de fonctionnement optimal de leurs gènes a intégré ce facteur. La sédentarité apparue récemment s’accompagne donc d’une perte de potentiel fonctionnel, et cela se traduit par l’augmentation du risque de nombreuses maladies, et notamment les cancers. Pour les personnes ayant déjà une activité régulière, la recommandation est de la continuer pour ne pas se fragiliser en perdant une part de leur potentiel déjà acquis. Pour celles qui ont peu d’activité, il est évident que l’intégration durable d’exercices physiques dans leur quotidien apporte un bénéfice majeur, qui favorise le processus de guérison et le maintien de la santé à venir.
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III – ÉTABLIR UN PROGRAMME ADAPTÉ À CHACUN FACE AU CANCER
Très souvent, ce n’est pas le manque de solution qui handicape l’établissement d’un programme de soin intégratif, mais le trop grand nombre qui complique le choix. Les facteurs développés précédemment nous donnent à la fois un cadre clair sur lequel s’appuyer, et une hiérarchie qui permet de procéder logiquement et efficacement.
1. Évaluer le niveau de souveraineté de la personne malade
Le premier facteur, prendre en main sa santé, est un idéal qui n’est pas à la portée de tous. Le poser comme un préalable nécessaire serait forcer quelque chose qui n’est pas forcément adapté à la personne, et pourrait lui être davantage nuisible qu’utile.
Ce bilan de souveraineté est primordial. Il conditionne le type d’accompagnement optimal qui sera proposé. Une personne qui n’a pas les moyens ou pas le désir de prendre le gouvernail de sa barque, ne peut pas être poussée en ce sens, ce serait contraire à l’éthique qui nous demande avant tout d’être avec elle. Il est plus bénéfique dans cette situation de valider la compétence de l’équipe médicale qui la prend en charge en lui laissant le rôle passif qu’elle souhaite, et de n’intervenir que dans le cadre de demandes qui s’intègrent au programme suivi.
Le positionnement d’un proche qui prend les choses en main est toujours délicat à gérer. Même validé par la personne elle-même, il peut s’agir d’une vraie relation de confiance ou d’une soumission qu’elle adopte pour se protéger des pressions qu’elle craint de subir.
Dans le cas d’un sujet rebelle à la médecine, quel que soit le point de vue des praticiens à ce sujet, il est préférable de faire son possible pour que la personne ne se coupe pas de cette ressource. Il y a au moins deux raisons à cela : la compétence médicale est sans doute plus utile qu’elle ne le pense. Il est aussi possible qu’elle y vienne ou revienne si les choses se passent mal. Ce sera alors bien plus difficile si le lien a été coupé.
2. Faire un bilan des ressources favorable au chemin de guérison
Pour chaque facteur mis en avant, le bilan est simple à effectuer : où en est la personne de ce point de vue, quelle est sa marge de changement pour optimiser les effets bénéfiques, qu’est-ce qui peut réellement être mis en place pour elle-même.
3. Choisir une équipe thérapeutique cohérente associant des compétences complémentaires
L’équipe médicale prend en charge le traitement direct de la maladie. Elle peut être ouverte ou non aux accompagnements et soins complémentaires. C’est la personne malade qui choisit les praticiens qui vont intervenir dans son parcours. C’est elle aussi qui choisit ce qu’elle dit ou ne dit pas sur les interventions des autres à chacun d’eux. Et dans tous les cas, un accompagnant qui se veut vraiment aidant pour la personne ne critiquera jamais les autres. Il essayera au mieux de se coordonner à ce qui a déjà été entrepris.
4. Définir un programme
Les soins médicaux acceptés par la personne sont le centre d’un processus autour duquel peut se construire un programme intégratif qui va mettre en synergie des facteurs favorables. Pour le choix de ce programme, et pour son suivi conduisant à d’éventuelles adaptations, il est essentiel que la personne malade se trouve un accompagnant référent. Celui-ci, dans une relation de confiance établie, l’aide dans ses choix, sans les prendre à sa place, ni même l’influencer dans ce qu’il croit être le mieux pour elle (qui est en fait ce qui serait le mieux pour lui s’il était à sa place !). Donner des informations objectives et tenir un cadre qui permet de faire des choix au moment où cela est nécessaire est la qualité attendue d’un tel accompagnement.
5. Accompagner et soutenir la mise en œuvre du programme
Choisir un programme est un premier pas, les suivants sont de le mettre en œuvre. Ce n’est pas le plus facile. Difficultés rencontrées, évènements imprévus, doutes, perte de motivation… les motifs de renoncement sont nombreux. C’est à ce niveau que l’accompagnement joue un rôle de premier ordre.
Il y a besoin parfois d’une certaine autorité pour que le chemin soit poursuivi. Tant que cette autorité s’appuie sur un choix librement exprimé, et respecte la possibilité de reconsidérer ce choix, cette autorité n’est pas une prise de pouvoir abusive.
En cas de désir d’abandon, la juste attitude est de faire en sorte que cet abandon ne soit pas acté sur un coup de tête, mais au bout d’une réflexion qui a pesé toutes les conséquences. Le désir d’abandon est un obstacle habituel qui se présente sur le chemin. Savoir le dépasser fait partie du chemin.
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RÉFÉRENCES
- Kelly A. Turner : Radical remission – HarperOne 2014. Traduction française : les 9 clés de la rémission – Flammarion 2017. Site internet Radical remission
- Recommandations WCRF/AICR 2018 pour la prévention nutritionnelle des cancers
- Pr John Sarno : Le meilleur antidouleur c’est votre cerveau – Thierry Souccar éditions 2015.
- Synthèse Psychologie positive
- Frans de Waal : l’âge de l’empathie – Acte sud 2011
- Vidéo Joël De Rosnay sur l’épigénétique (3 mn 30)
- Interview David Spiegel
- Centre Ressource
- Méditer (livre + CD) de Jon Kabat Zinn, avec la voix de Bernard Giraudeau – Éd les Arènes 2014
- Donner un sens à sa vie – Cerveau et Psycho n°109 : janvier 2019.
- MTC et cancer