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Il existe plusieurs formes d’hypothyroïdies : avec baisse d’hormones et sans baisse d’hormones, avec une cause connue et sans cause connue, avec des manifestations marquées ou avec des manifestations discrètes. Il existe également plusieurs solutions disponibles : médicamenteuses, nutritionnelles, phytothérapiques, psycho-émotionnelles.
Comment choisir la meilleure solution dans chaque situation ? La démarche demande dans un premier temps de mieux connaître et mieux comprendre les mécanismes, les manifestations et les voies de diagnostic.
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I. PHYSIOPATHOLOGIE DES HYPOTHYROÏDIES
1. La complexe régulation des hormones thyroïdiennes
La glande thyroïdienne reçoit une commande du système nerveux par le TRF (thyrotropin releasing factor), qui active la production de TSH (thyroid stimulating hormone) au niveau de l’hypophyse. La TSH stimule la glande thyroïde afin qu’elle produise les hormones en incorporant de l’iode à un acide aminé : la tyrosine [1].
Les hormones formées (T3 et T4) sont stockées dans la substance colloïde de la glande sous forme de thyroglobuline. Il y a ainsi environ deux mois de réserve qui permettent de remédier aux fluctuations des apports en iode. Une enzyme libère les hormones T3 et T4 en fonction des besoins. Elle est inhibée par un excès d’iode qui est donc un facteur d’hypothyroïdie.
La T4 est largement majoritaire (90 %), alors que la T3 est la forme active. La T4 a une demi-vie longue (environ 1 semaine) et la T3 une demi-vie courte (environ 1 jour). La T4 constitue donc une forme de réserve circulante capable de fournir de la T3 aux tissus en fonction des besoins.
Deux enzymes peuvent agir sur la T4 au niveau du foie principalement, et aussi des autres tissus : la 5’-désiodase donne de la T3 active, alors que la 5-désiodase donne une forme inactive, la T3 reverse (rT3), qui permet d’éliminer les excès dont l’organisme n’a pas besoin.
La T3 agit sur des récepteurs spécifiques qui activent le métabolisme et de nombreux mécanismes biologiques.
Les hormones circulantes, exercent une régulation sur l’hypophyse qui ajuste la production de TSH. Cette régulation est plus complexe qu’un simple rétrocontrôle entre T4 et TSH comme il est souvent indiqué dans les manuels. La TSH semble avant tout se mettre à un niveau répondant à une norme propre à chacun et ajustée selon de multiples facteurs parmi lesquels le niveau de TRH (information venant du système nerveux), le niveau d’hormones thyroïdiennes circulantes, et le niveau d’autres hormones, œstrogène et cortisol notamment.
Nous comprenons alors pourquoi une table d’interprétation de l’état de la fonction thyroïdienne en fonction de la valeur de la TSH applicable à tous est un modèle théorique qui ne correspond pas à la réalité de chacun.
L’organisme est équipé pour avoir à sa disposition toutes les hormones thyroïdiennes dont il a besoin. Sauf en cas de lésion de la glande ou de carence durable en iode, il n’a a priori aucune raison d’en manquer.
Or, des insuffisances thyroïdiennes sont observées dans des situations où aucune cause organique n’est identifiée. Quelque chose d’autre se joue. Un mécanisme semble pousser l’organisme à se mettre de lui-même en hypothyroïdie, pour répondre à un contexte dont la logique nous échappe. Nous entrons alors dans la complexité vivante de l’hypothyroïdie fonctionnelle.
2. Place des hypothyroïdies dans les pathologies thyroïdiennes
Il y a trois mécanismes principaux de pathologie thyroïdienne, avec dans chaque type différentes causalités.
– Les dysfonctionnements de la production d’hormones conduisent à une hypo ou une hyperthyroïdie.
– La formation de nodules est objectivée par l’échographie. Ceux-ci peuvent être productifs d’hormones (chauds à la scintigraphie) ou non (froids). S’ils sont froids, la cytologie permet de distinguer s’ils sont cancéreux ou non.
– L’inflammation (thyroïdite) peut être d’origine infectieuse ou auto-immune.
Les nodules et les thyroïdites peuvent être associés ou non à un dysfonctionnement de la production hormonale. Si celle-ci est préservée, on parle de pathologie euthyroïdienne.
3. Manifestations cliniques
Les fonctions directes et indirectes des hormones thyroïdiennes sont nombreuses. Il y a ainsi de multiples conséquences à leur insuffisance, avec des manifestations qui varient d’une personne à l’autre, selon les terrains biologiques et les pathologies associées.
Il n’y a pas de signe spécifique d’une hypothyroïdie, c’est l’association de plusieurs manifestations liées à la fonction thyroïdienne qui doit alerter.
Les principaux symptômes :
– Hypothermie (t° axiale, prise le matin, inférieure à 36,7°), avec une sensibilité au froid.
– Fatigue dès le matin, conduisant à une lenteur physique et psychique, avec une tendance à l’amélioration en cours de journée.
– Peau sèche, pâle, plutôt froide et rugueuse. La rugosité de la face externe du bras est inconstante mais typique.
– Faiblesse des phanères : ongles fins et cassants, cheveux qui tendent à blanchir avant 40 ans et tomber facilement, sourcils clairsemés surtout au bord extérieur (signe de Hertoghe, typique, qui peut disparaître).
– Troubles neuro-psychiques liés à une mauvaise oxygénation cérébrale, avec des manifestations diverses : déprime (surtout matinale), difficultés de concentration, troubles de mémoires, maux de tête.
– Insuffisance circulatoire pouvant se manifester à tous les niveaux : hypotension avec un rythme cardiaque ralenti, insuffisance veineuse (jambes lourdes, varices), rétention d’eau (œdèmes, paupières gonflées le matin), et froideur des extrémités.
– Troubles digestifs allant dans le sens d’un ralentissement : perte d’appétit, digestion lente, troubles fonctionnels intestinaux, constipation.
– Crampes musculaires, notamment au niveau des mollets la nuit. Elles sont aggravées par la déficience en magnésium.
– Faiblesse de la sphère ORL qui peut se manifester par des infections, des aphtes, une langue épaisse, des troubles de déglutition, des éternuements qui s’enchaînent les uns aux autres.
– Troubles de la posture avec difficulté à se tenir droit et tendance à la proéminence de l’abdomen.
– Troubles métaboliques avec problèmes de poids, dans un sens ou dans l’autre, non proportionnés aux apports alimentaires. La prise de poids est plus fréquente. L’impossibilité de perdre ou prendre du poids malgré une démarche adaptée est un signe d’alerte.
– Perturbations hormonales chez la femme : cycles irréguliers, syndrome prémenstruel, problèmes de fertilité, complications de grossesse.
L’amélioration rapide de certains signes avec un traitement thyroïdien est la meilleure confirmation de l’hypothyroïdie.
4. Origine des hypothyroïdies
Il y a hypothyroïdie dès lors que les fonctions physiologiques des hormones thyroïdiennes ne sont pas pleinement exercées :
– Soit par insuffisance quantitative de ces hormones : hypothyroïdies organiques sont d’origine centrale ou thyroïdienne.
– Soit par manque d’activité d’hormones présentes a priori en quantité adéquate : hypothyroïdies fonctionnelles qui ne sont pas associées à un organe.
4.1. Les hypothyroïdies organiques
Elles entrent dans le modèle classique décrit en médecine. Elles sont associées à une perturbation du bilan biologique (TSH, FT4, FT3) qui permet de les objectiver. Dans les formes marquées, il y a une diminution des hormones thyroïdiennes circulantes qui permet d’objectiver leur gravité. Dans les formes frustres, FT3 et FT4 ont des valeurs usuelles et c’est seulement la TSH qui est accrue.
– Les hypothyroïdies centrales résultent d’un défaut de production de TSH par l’hypophyse, ce qui conduit à une atrophie de la glande thyroïde. Elles sont rares. Elles se distinguent facilement dans un bilan biologique par le fait que tous les paramètres sont abaissés (TSH, FT4, FT3).
– Les hypothyroïdies d’origine thyroïdienne sont fréquentes. Dans leur forme typique, on observe des signes cliniques et un abaissement des hormones circulantes, avec une TSH augmentée par effet du rétrocontrôle. Cette insuffisance thyroïdienne est favorisée par de multiples causes.
Facteurs favorisants d’hypothyroïdies pondérales d’origine thyroïdienne |
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Trouble congénital | Défaut de développement de la glande thyroïde non mature à la naissance |
Déficit en iode | Alimentation appauvrie en iode → diagnostic par iodurie (avec cependant une fiabilité limitée) |
Excès d’iode | L’excès d’iode (alimentaire ou complémentaire) paradoxalement, inhibe (transitoirement) la production d’hormones thyroïdiennes et peut installer une hypothyroïdie qui est généralement transitoire. |
Médicaments | Amiodarone (dysthyroïdies fréquentes : 2/3 hypo, 1/3 hyper), Lithium (goitre fréquent mais hypothyroïdie rare) |
Interférence hormonale | – Insuffisance surrénalienne, – Augmentation du rapport œstrogène/progestérone (SPM, préménopause), – Grossesse avec un taux élevé de ßHCG. |
Xénobiotiques | Métaux, polluants divers : action favorisante indirecte |
Thyroïdite infectieuse | Inflammation de la glande thyroïde suite à une infection |
Thyroïdite auto-immune | Inflammation et interférence d’autoanticorps sur la synthèse hormonale |
Stress, choc émotionnel | Synergie de divers mécanismes |
Vieillissement | Effet complexe lié à l’affaiblissement de la thyroïde mais aussi à la baisse du potentiel métabolique (cible de l’action thyroïdienne). |
– Les hypothyroïdies frustres manifestent ou non des signes cliniques. Les hormones sont retrouvées à un niveau habituel dans le sang, alors que la TSH est augmentée. Cela est généralement interprété par le fait que la stimulation hypophysaire doit être accrue pour maintenir le niveau hormonal suffisant dans le sang, et donc que la glande est en difficulté. Mais n’oublions pas que la régulation de la TSH est plus complexe qu’un simple rétrocontrôle et que toutes les « hypothyroïdies frustres » ne répondent pas forcément à ce mécanisme.
4.2. Les hypothyroïdies fonctionnelles
L’hypothyroïdie fonctionnelle est un syndrome dans lequel on retrouve les manifestations cliniques de l’hypothyroïdie, sans perturbation des paramètres biologiques habituels (TSH, FT4, FT3).
Il s’agit donc d’une hypothèse répondant à un constat clinique et pour laquelle il n’y a pas d’explication biologique satisfaisante.
RÉCAPITULATIF DES BILANS BIOLOGIQUES SELON LE TYPE D’HYPOTHYROÏDIE |
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TSH | T3 et T4 | Manifestations cliniques |
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Origine centrale | ⬇⬇ | ⬇ | + + |
Origine thyroïdienne/manifeste | ⬆⬆ | ⬇ | + + |
Origine thyroïdienne/frustre | ⬆ | N | 0 / + / ++ |
Hypothyroïdie fonctionnelle | N | N | + / + + |
5. La signification controversée de la TSH
5.1. Interprétation classique
La TSH est le facteur clef de la régulation, puisqu’elle active la production d’hormones thyroïdiennes. Elle s’autorégule en fonction de cette production et de la commande du système nerveux, elle-même autorégulée en fonction de divers facteurs. Ce système complexe ne se résume pas à un rétrocontrôle par la concentration sanguine de T4, même si celle-ci a probablement un rôle déterminant.
Le dosage de TSH, apparu en 1950, s’est imposé comme le facteur majeur de diagnostic des hypothyroïdies. Dans les formes d’origine centrale (rares) elle est abaissée, dans les formes d’origine thyroïdienne (fréquentes) elle est augmentée, et de manière très sensible.
Ainsi, une TSH normale exclut tout problème organique de la fonction thyroïdienne, et les élévations modérées associées aux hypothyroïdies frustres permettent une détection précoce du problème.
5.2. Remise en cause des normes
Cependant, dès 1976, un médecin américain mettait en doute la pertinence de ce test. Aujourd’hui, des praticiens spécialistes de la thyroïde font le même constat : certaines personnes souffrent de véritables hypothyroïdies sans perturbation du dosage de TSH.
La première réaction est alors la remise en cause des normes proposées, qui sont des normes statistiques (moyenne de population) et non des normes de santé (zone n’incluant que des sujets en bonne santé). Les normes habituelles sont entre 0,35 et 4,9 mUI/l. Or, des observations montrent que dès que la valeur dépasse 1,5 mUI/l, il y a une augmentation statistique de certains risques de santé qui affectent l’espérance de vie. On pourrait donc appliquer une norme de santé inférieure à 1,5. Y aurait-il pour autant corrélation avec les signes d’hypothyroïdie, alors que les dosages d’hormone T3 et T4 sont normaux, et que des personnes avec une TSH modérément élevée (jusqu’à 10) ne présentent pas de signes cliniques d’hypothyroïdie ?
En fait, la vraie question est la signification réelle de la TSH. Il est évident que celle-ci réagit fortement aux concentrations d’hormones thyroïdiennes, et les fortes variations de TSH, dans un sens ou dans l’autre, sont toujours associées à une modification de T3 et T4. En revanche, on constate deux types d’anomalies :
– Des élévations modérées de TSH sans perturbation des dosages hormonaux et sans signes d’hypothyroïdie ;
– Des signes d’hypothyroïdies évidents avec une TSH normale.
5.3. Variation selon le moment de prélèvement
Un facteur est souvent négligé : la sécrétion de TSH suit un rythme nycthéméral avec le niveau le plus bas dans l’après-midi. Sa concentration sanguine en TSH varie au cours de la journée, et elle pourrait être l’après-midi 25 à 30 % plus basse que le matin [2]. D’autre part, il a été montré que sa sécrétion est pulsatile et la sécrétion est modifiée selon la durée du sommeil [3].
Ces variations liées au moment de prélèvement indépendamment de l’activité thyroïdienne ont été très peu étudiées et sont rarement prises en compte.
Pour éviter tout risque d’erreur, il est préférable de faire le prélèvement le matin avant 10 heures, et de vérifier sur un autre prélèvement les valeurs qui sortent de l’intervalle optimal.
5.4 Quelle importance donner à la valeur de la TSH
Il apparaît donc que la TSH est un marqueur utile quand il est modifié et trompeur quand il est dans la zone haute de normalité. C’est un critère utile au diagnostic mais non suffisant pour exclure une hypothyroïdie frustre. En d’autres termes, sa valeur prédictive positive est bien plus intéressante que sa valeur prédictive négative.
La TSH en bref • Valeurs usuelles (normes statistiques) : 0,35 à 4,9 mUI/l |
6. Le défaut de conversion de la T4 et T3
Le défaut de conversion de T4 en T3 (cf. paragraphe 1) est souvent mis en avant comme cause de déficience thyroïdienne. Cependant, il est rare d’observer des concentrations de T3 libre (FT3) abaissées avec une FT4 normale. Les syndromes de basse T3 décrits dans la littérature médicale concernent essentiellement des situations de dénutrition chez la personne âgée.
En fait, selon Benoît Clays [a], la FT3 serait un marqueur peu sensible du niveau réel de T3 disponible. Le rapport T3 totale/TBG, qui compare le taux de l’hormone à son transporteur serait plus fiable. Ses valeurs usuelles sont entre 0,04 et 0,10. Plus fiable encore selon lui, le dosage des T3 urinaires (sur 24 heures) permet d’observer régulièrement des diminutions avec des T4 urinaires normales. Dans certains cas, on peut objectiver une augmentation de la rT3, qui révèle une orientation métabolique vers l’élimination urinaire.
Le 5’-désiodase responsable de la transformation de la T4 en T3 nécessite de nombreux cofacteurs métaboliques, ce défaut de conversion régulièrement attribué aux déficiences vitaminiques et minérales par les nutritionnistes. Cela n’exclut pas d’autres raisons, plus complexes, qui orientent le métabolisme vers un déficit de T3 en augmentant la production de T3 reverse inactive (rT3). Cela se produit notamment pour réduire le métabolisme de base, quand l’adaptation biologique le nécessite. Ce phénomène se produit naturellement en été, en augmentant de 20 à 40% la rT3 [c].
En résumé, le défaut de conversion de T4 en T3 intervient probablement dans certaines insuffisances thyroïdiennes, selon plusieurs mécanismes, et ne se détecte pas dans un bilan thyroïdien classique. Son rôle dans certaines hypothyroïdies est difficile à évaluer.
7. L’hypothyroïdie de type II
La notion d’hypothyroïdie de type II a été introduite par Mark Starr, par analogie au diabète de type II dans lequel l’insuline est présente, mais la résistance des récepteurs à son action fait qu’elle n’est pas active [4]. De même, il semble y avoir une résistance à l’action des hormones thyroïdiennes qui sont présentes dans le sang. Cette situation correspond à une hypothyroïdie fonctionnelle.
Cette notion peine à s’imposer dans le monde de l’endocrinologie. Le livre de Mark Starr publié en 2008 n’est toujours pas traduit en français.
La notion de résistance aux hormones thyroïdiennes est cependant différente de celle de résistance à l’insuline qui est la conséquence d’une usure liée à des apports inappropriés en sucre. L’hypothyroïdie fonctionnelle a des origines mystérieuses qui semblent résulter d’un mécanisme multifactoriel complexe.
8. Thyroïde et terrains endocriniens
La notion de terrain endocrinien a été introduite par le Jean Gautier (1891-1968) dans la première moitié du XXe siècle. Ses écrits sont désormais épuisés.
La démarche a été poursuivie par le Jean du Chazaud avec l’appellation endocrino-psychologie [5]. La fonction thyroïdienne y est présentée comme un facteur clef du fonctionnement de l’ensemble de l’organisme.
Sans continuité affichée avec Jean Gautier, Jean-Claude Lapraz et Christian Duraffourd ont proposé l’endobiogénie [6], [7], [8], qui se présente comme une approche globale et personnalisée de la médecine et pose en postulat la primauté du système endocrinien sur la physiologie.
Ces approches décrivent un terrain de faiblesse thyroïdienne présentant spontanément des manifestations de l’hypothyroïdie, sans que cela soit systématiquement relié à une diminution des hormones circulantes. Nous serions donc bien dans une hypothyroïdie fonctionnelle. La distinction entre forme organique ou fonctionnelle, tout comme la prédisposition éventuelle de la première à la manifestation de la seconde ne sont cependant pas clairement abordées.
La notion de terrain thyroïdien peut devenir enfermante si elle devient une typologie qui voit la physiologie avant tout à travers le filtre endocrinien. C’est un peu la tendance montrée par l’endocrino-psychologie et l’endobiogénie qui proposent chacune un nouveau modèle de globalité à partir de leur point de vue. Il est aussi étonnant que deux conceptions aussi proches semblent s’ignorer et ne coopèrent pas entre elles !
Ce sont des médecines de terrain avec qui repose sur un modèle spécifique placé au centre de la globalité et qui détermine des typologies. On ne peut donc contester l’appellation de médecine globale et personnalisée [9].
Cette approche de terrain peut en revanche devenir précieuse si elle s’intègre dans une globalité ouverte et si elle apporte des solutions durables pour des personnes souffrant d’hypothyroïdie fonctionnelle, et laissées sans reconnaissance et sans solution par l’endocrinologie médicale.
Il serait très utile d’éclaircir, par l’observation statistique, le lien entre une faiblesse thyroïdienne liée au terrain, et l’hypothyroïdie pathologique pouvant être diagnostiquée médicalement.
9. Aspects psychiques
La santé globale ne peut ignorer la dimension psychique, et la fonction thyroïdienne semble particulièrement concernée. Il est clair que les perturbations de cette glande ont des répercussions immédiates et bien connues sur le psychisme. La manière dont le psychisme agit sur la fonction est en revanche plus complexe.
9.1. Influence de la thyroïde sur le psychisme
La relation entre la thyroïde et le psychisme est évidente dans ce sens : tout dysfonctionnement thyroïdien affecte fortement l’activité psychique.
Une hypothyroïdie ralentit et limite le fonctionnement du système nerveux, conduisant aux signes habituels d’une dépression : manque d’intérêt, processus mental lent, réduction des facultés cognitives, notamment la mémoire. Dans ce contexte, il est clair que la fonction psychique est tributaire de la biologie qui ne lui permet pas de s’exercer correctement, et le traitement hormonal permet alors des effets spectaculaires. Un traitement psychotrope est dans ce cas mal ciblé et peu efficace !
9.2. Influence du psychisme sur la thyroïde
Le psychisme influe-t-il sur la thyroïde ? La relation est plus difficile à démontrer dans ce sens. Nous avons évoqué quelques pistes dans la première partie de ce dossier. Au-delà de l’analyse psychosomatique précise qui fait des suppositions et les vérifie en trouvant dans le passé de la personne les éléments qui corroborent aux suppositions, il y a un fait biologique incontestable : la glande thyroïde est stimulée par l’hypophyse (via la TSH), elle-même stimulée par l’hypothalamus (via le TRF), qui fait lui-même partie intégrante du cerveau. Dans ce système complexe : tout est lié et chaque élément agit sur les autres qui rétroagissent sur lui. Au final, il est difficile de discerner où est la cause et où est l’effet. C’est généralement le modèle de croyance avec sa hiérarchie des causes qui donne un sens aux flèches.
La réalité systémique (quantique dirait certains, bien que ce terme soit inadapté pour les structures macroscopiques) est qu’il est toujours subjectif de donner un sens aux flèches de causalité et d’établir ainsi des liens linéaires de cause à effet. Il est en revanche facile d’observer qu’en modifiant certaines conditions, l’ensemble évolue dans une direction ou dans une autre.
Prendre en compte le psychisme dans une affection thyroïdienne est donc une évidence dans une médecine globale. La meilleure façon de ne pas se tromper est de s’orienter vers un changement bénéfique pour la personne, indépendamment de sa pathologie spécifique. Ce qui pourra ainsi s’améliorer dans la globalité de l’être aura des effets bénéfiques directs ou indirects sur la partie malade.
10. Intérêt et limite des bilans thyroïdiens
Le bilan thyroïdien comprend un exemple d’examens biologiques, d’imagerie médicale, et cytologiques. Quelques-uns sont réalisés couramment et tandis que les autres sont spécialisés pour des situations spécifiques ou délaissés car considérés à tort ou à raison comme désuets.
10.1. Bilans biologiques
Les examens biologiques explorant la thyroïde sont fréquents du fait de leur simplicité à réaliser. On peut les classer en trois catégories [c] :
• Examens courants
– La TSH est explorée en priorité lors de suspicion de problème thyroïdien, et souvent effectuée systématiquement dans les bilans de dépistage. Elle est considérée comme suffisante pour écarter un dysfonctionnement thyroïdien tel qu’il est considéré en médecine. Nous avons vu précédemment que les choses ne sont pas aussi simples
– Les hormones circulantes sous forme libre (FT3 et FT4) quantifient l’ampleur du dysfonctionnement et différencie les formes marquées des formes frustres.
– Les anticorps antithyroïdiens (AAT) : anti-thyroperoxydase (anti-TPO), anti-thyroglobuline (anti-TG) et anti-récepteur de la TSH (TRAK) évaluent la composante auto-immune de la situation de la glande thyroïde.
– Le dosage de l’iode urinaire évalue le statut en iode, avec une fiabilité contestable du fait des fluctuations quotidiennes.
• Examens spécialisés
Dans certaines situations, il peut être effectué un test au TRF pour préciser la capacité de réponse hypophysaire à la stimulation du système nerveux.
• Examens délaissés
– Les hormones totales urinaires sont un examen ancien, qui a été abandonné au profit du dosage des hormones libres circulantes. Sa réalisation non automatisée est aujourd’hui compliquée. Selon Benoît Clays [a] : on peut observer des valeurs basses de ce dosage dans des situations de faiblesse thyroïdienne avec des manifestations cliniques, alors que le bilan classique n’est pas perturbé.
– La thyroxine binding globulin (TBG), transporteur principal des hormones thyroïdiennes a peu d’intérêt s’il est considéré de manière isolée. Le rapport T3/TBG permet toutefois une détection plus sensible de certaines hypothyroïdies que la FT3 seule.
– La T3 réverse (RT3) quantifie l’importance de la voie alterne de transformation de T4 et T3 qui donne une forme inactive. Son augmentation est associée à une baisse d’activité hormonale. L’interprétation de ce dosage est cependant délicate et doit être prudente
10.2. Bilans d’imagerie médicale
Ils ne sont pas vraiment utiles dans les situations d’hypothyroïdies, et le fait de les entreprendre peut conduire à compliquer le parcours diagnostic sans bénéfice réel
– L’échographie, simple à effectuer et non envahissante, permet de détecter, compter et évaluer la taille des nodules, qui sont fréquents avec des significations pathologiques très variables. De nombreux nodules bénins et sans conséquence conduisent parfois à des parcours de vérification anxiogène, s’il est choisi de ponctionner le nodule pour une analyse cytologique. L’échographie de plus en plus performante détecte des micronodules identifiés ensuite comme des micro-carcinomes papillaires, ce qui a considérablement accru l’incidence des cancers thyroïdiens. Or ces micro-carninomes sont généralement non évolutifs [10] et n’auraient jamais posé de problème s’ils n’avaient pas été détectés. On entre alors dans la problématique du surdiagnostic d’un dépistage qui veut trop bien faire et finit par être néfaste.
– La scintigraphie est revanche envahissante, avec injection d’iode ou de technecium radioactif. Sa prescription doit donc être rigoureusement évaluée. Elle permet de détecter si un nodule produit des hormones thyroïdiennes (chaud) ou non (froid).
10.3. Cytologie
La cytoponction est effectuée sur les nodules pour déterminer par une analyse cytologique s’ils sont cancéreux ou non. Le risque de complication organique est faible, mais la démarche peut être anxiogène, et sa véritable utilité doit donc être évaluée.
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II. PRISE EN CHARGE DES HYPOTHYROÏDIES
Pour une prise en charge globale et intégrative des hypothyroïdies, la première étape est de bien cerner de quel type d’hypothyroïdie il est question, de déterminer s’il y a des causes actives, d’évaluer la pertinence et l’adéquation de toutes les solutions disponibles, et enfin d’établir un programme optimal personnalisé.
11. Trois points de vue sur la situation thyroïdienne
Aujourd’hui, plusieurs interprétations des dysfonctionnements thyroïdiens peuvent se simplifier en trois points de vue qui peuvent s’emboîter ou non comme des poupées russes. Le second et le troisième qui augmentent la sensibilité de détection ne sont pas pris en compte par une démarche médicale courante.
- L’approche médicale classique se limite aux signes objectivables : l’état de la structure de la glande dévoilée par l’imagerie, les niveaux d’hormones thyroïdiennes (T4 et T3) et de stimulant hypophysaire (TSH) mesurés par la biologie. Elle diagnostique les dysfonctionnements marqués et les traite avec succès par une supplémentation hormonale.
- L’approche médicale sensible mise en avant par certains médecins constate l’insuffisance des méthodes biologiques actuelles pour diagnostiquer une hypothyroïdie. Elle se réfère en priorité aux signes cliniques. Elle diagnostique davantage de situations hypothyroïdiennes et les traite avec un large panel d’outils (médicaments, nutrition, soins énergétiques, produits de santé naturels).
- L’approche des terrains hormonaux, pratiquée par certains médecins et naturopathes, considère qu’il y a des variations individuelles de l’équilibre hormonal. Certaines personnes ont une faiblesse de la fonction thyroïdienne (au sens large), indépendamment du niveau d’hormones circulantes.
Ces trois points de vue cohabitent dans l’univers thérapeutique actuel et conduisent à des situations confuses. Une personne peut entendre des avis différents et contradictoires sur son état de santé. La confusion est d’autant plus grande qu’il n’y a pas de pont explicatif clair pour relier les divers points de vue. Il n’existe pas de système unifié et cohérent de diagnostic et de soin pour les hypothyroïdies.
12. Soutien psychique
Le lien entre thyroïde et psychisme a été abordé précédemment.
Faire entrer la relation psychosomatique dans un accompagnement demande d’être prudent. Plusieurs observations concordantes ne permettent pas de généraliser un mécanisme, et le fait de trop croire à ce que l’on cherche conduit à toujours à le trouver, en donnant de l’importance à quelque chose qui n’en a peut-être pas autant. La question est donc bien de voir, indépendamment de tout modèle radical, comment se situe la personne dans son axe de vie et s’il existe des pistes de changement qui ont du sens pour elle [11].
Le soutien psychologique général est en revanche une base fondamentale de tout accompagnement intégratif, en établissant une relation de confiance et en intégrant la personne dans le choix de son programme thérapeutique afin qu’elle puisse y investir son enthousiasme et son courage.
D’une manière un peu plus spécifique, l’approche endocrino-psychologique [5] qui s’intéresse de près au terrain hypothyroïdien propose des outils psycho-émotionnels destinés à améliorer ce terrain.
13. L’approche selon les terrains hormonaux
L’importance des hormones dans la globalité de la physiologie a déjà été abordée dans un paragraphe précédent. La question d’une primauté du système endocrinien sur le système nerveux est une évidence phylogénétique, les animaux avaient un fonctionnement endocrine avant le développement du système nerveux, qui a apporté des facultés nouvelles. Le point de vue de Jean du Chazaud selon lequel le système nerveux ne serait qu’un enregistreur d’automatismes dont l’origine est hormonale est en revanche un point de vue discutable.
13.1. Un point de vue dont la vision extrême est contestable
Les hypothyroïdiens sévères n’ayant plus de sensibilité, plus d’émotions, et une faible adaptabilité et le rétablissement de ces facultés avec un supplément hormonal, signifierait que sensibilité, émotion et adaptabilité seraient d’origine thyroïdienne et non nerveuse. C’est là un raisonnement linéaire de cause à effet réducteur de la réalité complexe ! Les hormones thyroïdiennes soutiennent le fonctionnement du système nerveux un peu comme un branchement électrique soutient un ordinateur. Dit-on pour autant que les programmes développés par l’ordinateur dépendent de l’électricité ? Cette observation rappelle que les fonctions psychiques qui s’exercent dans le cerveau sont dépendantes de l’organisme qui maintient le fonctionnement du cerveau. Un organisme biologique complexe ne se simplifie pas à un programme hormonal. Il ne peut pas exercer sans le cerveau les mêmes fonctions qu’avec un cerveau.
La hiérarchisation des rôles dans un système complexe où tout est lié est un point de vue théorique toujours limitant vis-à-vis de la réalité. La réalité est que système nerveux et endocrinien sont deux éléments d’un ensemble cohérent. Le fait que l’on puisse définir des terrains particuliers avec une morphologie corporelle caractéristique et des fonctions hormonales dominantes est une chose. Le fait que les glandes endocrines soient le facteur déterminant d’une pyramide de causes à effets en est une autre. Relier les deux est un point de vue qui ne se justifie que par le fait d’y croire.
13.2. Pragmatisme thérapeutique
Le pragmatisme thérapeutique s’accommode mieux d’un modèle systémique dans lequel tout est relié dans une dynamique complexe sans hiérarchie rigide. Cela permet d’identifier en quoi la prise en compte des hormones peut améliorer le fonctionnement de l’ensemble, quels outils thérapeutiques peuvent être utilisés pour cela, et comment ce traitement peut s’intégrer dans un ensemble ouvert aux autres approches.
13.3. Solutions proposées par l’endocrino-psychologie et l’endobiogénie
L’endocrino-psychologie de Jean du Chazaud propose un traitement vibratoire appareillé : la méthode Équilios, dérivée de la technique d’Arsonval utilisée en son temps par Jean Gautier. C’est un système fermé, jamais évalué en dehors des témoignages d’utilisateurs. Certains naturopathes également inspirés par Jean Gautier proposent des techniques naturelles (exercice physique, hydrothérapie, nutrition, produits de santé naturels) pour restaurer les fonctions hormonales déficientes.
L’endobiogénie de Jean-Claude Dupraz propose des traitements spécifiques aux terrains qui s’appuient sur la phytothérapie.
13.4. Un lien non établi avec les pathologies thyroïdiennes
Le point qui reste confus dans cette approche est l’existence ou non d’un lien entre faiblesse de terrain hormonal (sans déficit détectable des marqueurs biologiques) et les pathologies dans lesquelles ces marqueurs sont affectés. S’agit-il d’une simple différence de degré sur une ligne de progression linéaire, ou s’agit-il de deux phénomènes indépendants ? Agir préventivement sur un terrain hormonal fonctionnel évite-t-il la survenue des hypothyroïdies organiques ? Les outils de soutien du terrain sont-ils utiles en cas de déficit hormonal avéré ?
14. Traitement médicamenteux des hypothyroïdies
Le traitement médicamenteux de l’hypothyroïdie utilise des hormones substitutives qui viennent remédier à la sécrétion insuffisante par la thyroïde. Il est indispensable en cas d’ablation de la glande. Il est la meilleure solution connue en cas de déficit avéré et grave. Il est une solution à évaluer lors des insuffisances modérées. D’un côté, il apporte une amélioration clinique rapide. De l’autre, il perturbe les mécanismes d’autorégulation et peut compromettre ainsi le processus d’autoguérison. Plusieurs formes sont disponibles.
- Les extraits secs de thyroïde d’origine porcine ont été longtemps la seule solution disponible. Ils ont l’avantage d’être un mélange naturel d’hormones (T3 et T4) avec une T3 qui semble assimilée plus lentement que la forme médicamenteuse. L’inconvénient est que le taux d’hormones est difficile à standardiser. Ces extraits ne sont plus disponibles en Europe. Ils peuvent être commandés sur le continent américain. Certains auteurs les préfèrent aux hormones de synthèse.
- La L-thyroxine (LévothyroxND) est une molécule synthétique analogue à l’hormone naturelle T4. Elle est assimilable par voie digestive et permet de supplémenter les insuffisants thyroïdiens. Les problèmes posés par certains génériques et une modification du LévothyroxND dans les années 2020 montrent que la biodisponibilité est très sensible aux facteurs environnants, notamment les excipients du comprimé. La durée de vie suffisamment longue de la molécule dans le sang permet de maintenir un niveau constant d’hormones disponibles avec une seule prise quotidienne. Ses effets sont parfois insuffisants et il faut dans ce cas envisager une mauvaise conversion de T4 et T3, ou une résistance aux hormones thyroïdiennes.
- La liothyronine (CynomelND) est une forme synthétique de T3, directement active. Il faut alors être prudent sur la dose car un surdosage qui conduit à des manifestations hyperthyroïdiennes peut facilement survenir. D’autre part, sa durée de vie dans le sang étant courte, il faut au moins deux prises par jour, et il est plus difficile de maintenir un niveau stable dans le sang.
- Le mélange L-thyroxine/liothyronine (EuthyralND) permet d’allier une action plus directe (T3) au maintien d’une réserve circulante stable (T4). Il est une alternative intéressante lors de l’échec d’un traitement à la T4 seule. Certains auteurs préfèrent ce mélange en première intention.
Les traitements substitutifs d’hormones thyroïdiennes doivent toujours être contrôlés par un test sanguin (TSH, FT4, FT3) afin de vérifier que le dosage soit suffisant et non excessif.
15. Nutrition
La nutrition intervient de plusieurs manières sur la fonction thyroïdienne. Certains aliments ont un effet inhibiteur et des nutriments sont indispensables à la formation et à la conversion des hormones.
- Le soja est le plus connu des aliments goitrogènes, parce que cet effet a été médiatisé par ses détracteurs, suite à l’observation de deux cas de personnes ayant développé une hypothyroïdie en consommant du soja plusieurs fois par jour. Ces personnes avaient une déficience préalable en iode. Tout est dit dans cet exemple : la consommation massive de certains aliments contenant des facteurs inhibiteurs de la thyroïde, associée à une déficience en iode, peut conduire à une hypothyroïdie.
Le soja n’est pas cependant le seul aliment concerné. Les crucifères, (choux divers, navets, rutabaga, brocolis, radis, etc.), le manioc, le millet, la patate douce… contiennent aussi de tels facteurs qui sont en partie inactivés par la cuisson. Les problèmes n’apparaissent qu’après une consommation excessive des aliments concernés, associée à une tendance déficitaire en iode. Une alimentation variée ne présente pas donc de risque thyroïdien, et cela est confirmé par les observations [12]. - L’iode est indispensable à la synthèse des hormones thyroïdiennes qui incorporent cet élément dans leur structure. Les carences sévères sont rares du fait de la supplémentation iodée dans les produits alimentaires transformés. En revanche, les déficiences relatives sont fréquentes. L’iode est présent de manière significative dans les aliments d’origine marine : poissons, fruits de mer, algues, et en proportions variables selon leur origine dans certains produits terrestres (œufs, laits, céréales…). Il est ajouté par l’industrie agroalimentaire dans l’alimentation animale et dans divers produits transformés.
En cas de déficience non comblée par un accroissement de la consommation des produits riches en iode, la complémentation doit être envisagée. La prudence est demandée car l’iode en excès peut avoir un effet inverse à celui recherché. Dans certains contextes, il peut devenir inhibiteur de la formation des hormones thyroïdiennes, avec un effet généralement réversible [13]. - La tyrosine est l’acide aminé précurseur de la T3 et de T4. Elle est fournie par une consommation suffisante de protéines.
- De nombreux cofacteurs: vitamine A, vitamines B1, B2, B3, B6 et B12, vitamine E, zinc, sélénium, magnésium, fer, manganèse, molybdène et cuivre sont nécessaires pour une synthèse optimale des hormones thyroïdiennes et la conversion de la T4 en T3. Tous ces nutriments sont en principe apportés par l’alimentation. Le sélénium, le magnésium et le zinc sont le plus souvent déficients. Lorsque les apports manquent, une réforme alimentaire durable doit être envisagée. Dans un premier temps, le temps de la transition, les micronutriments peuvent être fournis par une complémentation micronutritionnelle.
16. Phytothérapie
Selon Christophe Bernard [14], diverses plantes sont connues pour augmenter le niveau des hormones circulantes ou favoriser la conversion en T3 : Ashwagandha, Schisandra, Coleus et Guggul.
Benoît Claeys [a] cite Coleus, Guggul, Ashwagandha, ainsi que Achyranthes aspera et Bacopa monnieri.
Philippe Veroli [b] cite Ashwagandha, Guggul, Coleus, Schisandra, ainsi que Bacopa monnieri, Maca (Lepidium meyeni) et le lierre grimpant (Hedera Helix) en teinture mère, en évitant les fortes doses qui peuvent devenir toxiques.
Les plus couramment citées sont aussi les mieux documentées :
- Ashwagandha (Withania somnifera), appelé couramment ginseng indien, est une solanacée connue de la médecine ayurvédique. Les racines ont un effet adaptogène et favorisent le sommeil. Deux études sur la souris ont montré une capacité à augmenter les hormones thyroïdiennes. Cette plante est classiquement utilisée par les phytothérapeutes dans cet objectif.
- Guggul (Commiphora mukul) est un arbre dont la résine est un remède de la tradition ayurvédique. Parmi ses multiples propriétés, deux ont fait l’objet d’expérimentations positives : la baisse du cholestérol et le soutien de la fonction thyroïdienne en facilitant l’incorporation de l’iode et en améliorant la conversion de T4 en T3.
- Coleus (Coleus forskohlii) est une autre plante de la médecine ayurvédique. Son principe actif, la forskoline augmente l’activité de l’adénylcyclase, ce qui en accroissant localement le taux d’AMP cyclique a des effets favorables sur l’asthme, le glaucome, l’hypertension et favorise la fonte graisseuse. Elle semble également activer la thyroïde d’une manière proche de la TSH.
- Schisandra (Schisandrae chinensis) produit des baies connues par la tradition chinoise pour leurs propriétés toniques et détoxifiantes. Elles ont une forte activité antioxydante. Elles agissent comme un adaptogène et semblent soutenir l’activité thyroïdienne.
17. Autres produits
De nombreux autres produits sont proposés en santé naturelle pour soutenir la fonction thyroïdienne :
– Huiles essentielles
– Macérats de bourgeons
– Préparations homéopathiques
– Préparations spécifiques à action informative
L’utilisation de tous ces produits repose sur le savoir-faire et l’expérience de praticiens, et ne bénéficie d’aucune évaluation ou connaissance traditionnelle permettant de valider leur effet.
18. Quelle stratégie intégrative face à aux hypothyroïdies ?
Une approche intégrative associe les traitements médicamenteux, la dimension psychologique, la nutrition et les produits de santé naturels, dans un programme rendu cohérent et réaliste par la collaboration de la personne et son thérapeute.
Elle propose une réponse thérapeutique personnalisée à l’hypothyroïdie, en prenant en compte divers paramètres :
– La nature de l’hypothyroïdie : validée biologiquement, diagnostiquée par les signes cliniques, ou évaluée comme une faiblesse de terrain hormonal.
– La situation nutritionnelle et les possibilités de changement alimentaire.
– Le budget disponible pour les produits de santé naturels.
– La motivation à donner un sens évolutif à la pathologie.
• L’usage des traitements substitutifs hormonaux est une nécessité en cas de déficit hormonal validé par les examens biologiques, avec des signes manifestes d’hypothyroïdie. En cas de signes cliniques sans confirmation biologique, il n’est pas une première intention mais reste un recours en cas d’insuffisance des soins naturels. Dans tous les cas, l’échec du traitement à la lévothyroxine (T4) devrait conduire à utiliser un traitement associant T4 et T3.
• L’optimisation nutritionnelle vers une alimentation santé durable est toujours bénéfique, en réduisant le terrain inflammatoire, et en apportant davantage de micronutriments nécessaires au métabolisme thyroïdien, notamment un niveau satisfaisant et non excessif d’iode. Des compléments pris pendant les trois premiers mois du changement peuvent accélérer les effets ressentis.
• Les méthodes de soins naturels proposées par l’homéopathie, la naturopathie (hydrothérapie, exercices physiques), les pratiques psycho-énergétiques (Yoga, Qi Qong) et les soins énergétiques, dans le but de soutenir la santé générale et plus spécifiquement l’activité thyroïdienne, apportent une valeur ajoutée à la stratégie globale de soin.
• Les produits de santé naturels, phytothérapie et autres, ont des effets favorables, directement liés à l’action du produit, et qui cesseront donc à son arrêt. C’est pourquoi de telles cures doivent être envisagées avec un objectif clair sur une durée choisie, compatible avec le budget de la personne. Cette démarche évite de laisser plus tard cette personne démunie. Une cure de trois mois, associée à diverses modifications durables du mode de vie peut être un facteur précieux pour initier le changement.
• Lors d’une thyroïdite d’Hashimoto, l’hypothyroïdie n’est pas systématique et le traitement substitutif n’est utile que si l’insuffisance thyroïdienne est réelle et ressentie par des manifestations cliniques. La priorité est de prendre en compte le processus auto-immun et l’inflammation. Il existe pour cela une approche nutritionnelle et des traitements spécifiques ciblant le tube digestif et le système immunitaire.
• L’accompagnement psychologique est primordial : il donne une continuité et une cohérence à la démarche. Il permet aussi de s’interroger sur le sens positif que pourrait prendre la maladie en ouvrant la porte à une réorientation bénéfique du chemin de vie.
Dans tous les cas, une stratégie cohérente de santé durable privilégiera les démarches naturelles qui préservent la capacité d’autoguérison dans un premier temps, et présentera les solutions thérapeutiques avec une projection de la durée prévue. Un traitement qui pourrait durer toute la vie devrait toujours être discuté et accepté avant d’être commencé.
RÉFÉRENCES :
Principaux ouvrages ayant contribué à la rédaction de cette synthèse
[a] – Dr Benoît Claeys : En finir avec l’hypothyroïdie – Thierry Souccar éditions 2015
[b] – Dr Philippe Veroli : Thyroïde : les solutions naturelles – Thierry Souccar éditions 2016
[c] – Jacques B. Boislève & Patrick Cohen : Biologie médicale intégrative – Holosys éditions 2020-2023
Extrait 5 pages : le bilan thyroïdien
Autres références
1. Jacques B. Boislève : Biochimie physiologique et nutritionnelle – Holosys Éditions : 2022 Extrait : L’iode (pages 114-115)
2. M. A .Sviridonova& al : Clinical significance of TSH circadian variability in patients with hypothyroidism – Endocr Res. 2013, 38(1) : 24-31
3. G. Brabant& al : Physiological regulation of circadian and pulsatile thyrotropin secretion in normal man and woman – J Clin Endocrinol Metab 1990 Feb;70(2):403-9
4. Mark Starr: Hypothyroidism Type 2: The Epidemic – New Voice Publications; 2010-2013
5. Jean du Chazaud: la thyroïde, glande de la vie – Éditions Charles Corlet 2015. Site internet de l’auteur
6. Institut d’endobiogénie
7. Site de Jean-Claude Lapraz
8. J.C. Lapraz et M.L. Clermont-Tonnerre: La médecine personnalisée, retrouver et garder la santé – Ed Odile Jacob, 2012
9. Site Santé Vivante : Médecine personnalisée : les deux faces inconciliables
10 M.C. Burlacu : Surveillance active des microcarcinomes papillaires thyroïdiens – Louvain médical mars 2019
11. Site Psycho-Santé Intégrative : psychosomatique
12 Jacques B. Boislève : Nutrition Santé Essentielle – Holosys Éditions : 2021 Extrait : les facteurs goitrogènes
13. Site Nutrition Santé Essentielle : La carence en iode : des hypothèses qui interpellent, des croyances partisanes, la science peu intéressée, et peu de certitudes !
14. Christophe Bernard : Hypothyroïdie et santé naturelle