Depuis quelques années, on évoque des études arrangées ou non publiées car désavantageuses, qui ont permis la mise sur le marché de médicaments. La fraude en sciences est un phénomène plus général, devenu inévitable du fait du mode de fonctionnement de la communauté scientifique. Des facteurs conjoncturels favorisent son développement actuel. Cela pose une question majeure : notre confiance dans les études qui valident les données les scientifiques qui servent de base à la médecine est-elle fondée ou fait-elle de nous des naïfs manipulés ?
1) La fraude évoquée dans la presse de vulgarisation scientifique
Il y a quelques mois, le très sérieux magazine Sciences & Vie titrait en couverture : « Quand les scientifiques trichent, enquête dans les coulisses des labos ». Le problème n’est pas nouveau, il y a dans la science des fraudes historiques, révélées plus ou moins tardivement. Cependant, il semble que le phénomène s’accentue, de manière plus subtile. Dans le domaine de la santé, il concerne notamment les études cliniques qui valident les effets d’un médicament ou invalident ceux d’un produit naturel (c’est le plus souvent dans ce sens-là que ça se passe !).
Celles et ceux qui ne connaissant pas le milieu des sciences sont souvent surpris, voire sidérés d’apprendre dans quel cadre se déroule la recherche qui conduit à élaborer la connaissance scientifique. Il s’agit en fait d’un système ultralibéral qui a les mêmes avantages que son grand frère économique : il favorise l’initiative individuelle et s’autorégule par les nécessités collectives. Il a aussi les mêmes inconvénients : son autorégulation passe par l’écrasement des plus faibles et plus l’échelle est grande, plus le fossé se creuse entre ceux qui ont les rênes du pouvoir et les autres.
Comme dans une économie libérale, la science permet au chercheur d’obtenir la réussite à titre individuel. Ce peut être la gloire, ou la fortune s’il trouve dans un cadre privé le chemin d’un brevet.
La recherche est libre. En théorie, tout chercheur peut mener les travaux qu’il souhaite, en accord avec la hiérarchie de son laboratoire (c’est déjà un filtre puissant !). En pratique, deux facteurs majeurs orientent les programmes et les résultats publiés : l’argent et le pouvoir des aînés.
2) L’argent au cœur d’un système pervers
Le financement public n’étant plus à la hauteur du coût exorbitant des programmes actuels, c’est l’industrie privée qui est venue jouer les sauveurs de la recherche scientifique. Dans le domaine médical, l’industrie pharmaceutique et les associations (dans la lignée du Téléthon) sont en première ligne. Cette situation est par nature perverse. Le sponsor étant directement concerné par le résultat, l’équipe de recherche est dans la nécessité de le satisfaire pour obtenir le renouvellement du financement. Cela n’empêche pas l’honnêteté, qui est là très souvent, mais les petits dérapages sont faciles. Dans certaines circonstances, associé à un manque d’éthique ou une ambition personnelle du chercheur, ils peuvent devenir plus grands…
3) La hiérarchie scientifique et le contrôle des publications
La nécessité de publication est un autre problème qui prend de plus en plus d’ampleur. On est dans une situation similaire au système économique dans lequel les règles mises en place par ceux qui influencent le pouvoir (OMC et autres…) sont au service d’une pensée dominante et de ceux qui ont fait leur trou dans sa niche dorée.
Un chercheur est jugé au nombre d’articles qu’il publie et au prestige des revues dans lesquels paraissent ses travaux. Pour réussir, il vaut mieux avoir des résultats intéressants, qui piquent la curiosité, mais pas trop innovants pour respecter le système de pensée des aînés. Ceux-ci contrôlent en effet les axes de recherches et les revues qui publient les résultats.
Pour un scientifique qui a construit toute sa carrière sur une base de connaissance, imaginons son drame personnel si cette base est remise en cause ! Dépassé et trop vieux pour recommencer. Une vraie déchéance ! Il est donc tout à fait humain que ces êtres se défendent et protègent leurs acquis. C’est pourquoi il me semble plus juste de condamner un système plutôt que des personnes qui font au mieux avec ce qu’ils sont dans ce système.
En biologie et en médecine, cette situation est flagrante. Il y a aujourd’hui de nouvelles données sur la nature de l’eau et les phénomènes biophysiques qui conduiront tôt ou tard à une vraie révolution et sans doute la régression (et peut-être la disparition) du médicament chimique. Comment un biologiste ou un médecin qui a construit toute sa connaissance sur le fonctionnement biochimique du vivant peut-il s’intéresser à une nouvelle conception dans laquelle les aspects moléculaires sont aussi grossiers que la physique de Newton face à la mécanique quantique ! On l’a vu avec l’affaire Benveniste, cas exceptionnel d’une découverte dérangeante publiée dans une grande revue et diffusée par les médias, le rouleau compresseur est d’une incroyable puissance pour étouffer la véritable innovation (alors que la découverte a été largement vérifiée et validée depuis…).
4) Le discernement pour ne pas voir la fraude partout et sombrer dans un rejet réactionnel
Alors vous l’aurez compris, il est difficile aujourd’hui de faire une véritable recherche. À quoi bon chercher dans un domaine trop innovant si le résultat du travail ne sera pas publié ou risque de compromettre la carrière ! Et comment ne pas arranger un peu le résultat s’il y a un gros financement à la clé ? Il est facile de démontrer que la conduite et le résultat d’une étude est influencée par l’objectif initial du chercheur. Celui-ci peut même être totalement honnête dans ses intentions, avec en toute bonne foi, des choix automatiques vont orienter vers le résultat et l’interprétation qui arrange son subconscient. C’est tellement humain !
Mais ne devenons pas paranoïaque pour autant ! Les recherches et les publications qu’elles fournissent ont beaucoup apporté et continueront encore à enrichir la connaissance scientifique. Il convient juste à mon sens d’être de plus en plus vigilant. Tout ce qui est au service d’intérêts économiques ou idéologiques (et l’idéologie existe en science !) mérite d’être considéré avec prudence et demande une enquête indépendante sur la manière dont la recherche a été menée. D’autre part, il ne faut pas attendre de la science actuelle qu’elle scie la branche sur laquelle elle est si bien assise, c’est pourquoi tout ce qui remet en cause le modèle de machine biochimique en biologie a peu de chance d’aboutir.
Cela ne nous empêche pas de croire en la validité d’un autre modèle et de faire l’effort d’aller chercher hors des circuits habituels des travaux éclairants, boudés par la communauté scientifique dominante pour cette unique raison.